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Le Principe de Lucifer Tome 2 , Le Jardin des Livres
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électronique ou autre constitue une contrefaçon
passible des peines prévues par la loi du 11 mars 1957 et du 3
juillet 1995, sur la protection des droits d'auteur. Livre
publié en accord avec Baror International Inc. PO Box 868
Armonk, NY, 10504-0868 USA.
Revue
de Presse
Le
Principe de Lucifer Tome 2
« Le
Cerveau Global »
Howard
Bloom pourrait bien être le nouveau Stephen Hawking Simplement,
il ne s'intéresse pas seulement à la science, il
s'intéresse aussi à l'âme.
Aaron
Hicklin, Gear
Un
merveilleux Cantique des Cantiques à propos des
origines amoureuses de l'Univers et de son besoin presque
médiéval de copuler.
Kevin
Kelly, Editor
J'ai
rencontré Dieu, il habite à Brooklyn (...) Howard Bloom
est le suivant d'une lignée de penseurs séminaux qui
comprend Newton, Darwin, Einstein, Freud et Buckminster Fuller
(...) Il va changer la manière avec laquelle nous nous voyons
ainsi que tout ce qui nous entoure.
Richard
Metzger, directeur de "The Disinformation Company" et
animateur de Channel 4, TV Disinfo Nation, en Grande Bretagne.
A
tous ceux qui pensent que notre ingénuité a perturbé
l'équilibre de la nature, Howard Bloom a un message qui est
aussi rassurant que sombre : « Nous sommes la
nature incarnée », écrit-il, « Nous
sommes les outils de ses essais, et si effectivement nous souffrons
et si nous échouons, elle va, de nos échecs, apprendre
les voies à éviter dans le futur ».
The
New-Yorker
Le premier ouvrage de Bloom ( Le Principe de Lucifer Tome 1 )
s'attaquait à la source biologique de la violence humaine.
Maintenant, il s'est attaqué à quelque chose d'encore
plus ambitieux. Alors que quelques cyber-allumés du Web
disent qu'Internet nous emmène vers une sorte de cerveau
mondial, Bloom, lui, dit que nous sommes dans ce cerveau
mondial depuis longtemps ... Bloom
défend la sélection de groupe, ( un point de vue
minoritaire parmi les évolutionnistes ) et retrace la
coopération entre les organismes et la compétition
à travers l'histoire de l'évolution. Les 'réseaux
créatifs' des micro-organismes primaires se sont unis
pour trouver de la nourriture: les colonies modernes de
bactéries E-coli semblent s'être programmées
elles-mêmes pour des mutations utiles et absolument pas
hasardeuses. La Sparte antique tuait ses enfants les plus faibles;
Athènes les éduquait. Chacun de ces comportements est
un système d'apprentissage social. Et chacun de nous repose
sur différentes fonctions. Les « agents de
conformité » forcent la plupart des membres du
groupe à faire la même chose; les « générateurs
de diversité » cherchent les nouveautés 
les « distributeurs de ressources » aident le
système à se modifier au profit des nouveautés
qui fonctionnent. Dans le modèle de Bloom, les ligues
sportives, les bactéries, les bêtes, et la Belgique,
tous se comportent de la même manière".
Publishers
Weekly
Une
théorie évolutionniste nouvelle et fascinante qui peut
changer profondément notre manière de voir la vie, et
une nouvelle vision du monde qui peut bouleverser notre
interprétation des structures sociales.
Florian
Roetzer, Telepolis, Allemagne
Le
Cerveau Global est une pure merveille ! Je suis fasciné
par sa masse d'érudition et l'immensité de sa portée.
L'idée du cerveau de masse est fabuleuse, intelligente et
extraordinairement créative.
Georgie
Anne Geyer, Universal Press Syndicate.
Un
prophète contemporain, Bloom nous force à admettre
que l'évolution est un sport d'équipe. C'est une image
de l'Univers dans lequel les émotions humaines trouvent leur
base dans la survie de la matière, et que les atomes eux-mêmes
sont collés ensemble avec de l'amour. Je suis bouleversé.
Douglas
Rushkoff, auteur de Media Virus.
Ce
tome volumineux, généré par l'habitude vorace de
lire, et surtout le talent de conteur extraordinaire de Bloom,
affirme que les groupes, des humains aux singes en passant par
les bactéries, s'organisent d'eux-mêmes, créent
la nouveauté, transforment leur environnement et triomphent
pour laisser bien plus de descendants que les individus solitaires.
Un incroyable dévouement à la preuve scientifique,
cette suite du Principe de Lucifer veut purger le monde
académique des gènes individuels et du dogme
néodarwiniste de la sélection naturelle.
Lynn
Margulis, Professeur, University of Massachusetts, lauréat en
1999 de la "National Medal of Science" et auteur de
Symbiotic Planet: A New Look at Evolution.
Dans
un ouvrage superbement écrit et avec un argument
totalement original, Howard Bloom continue son habitude de
titiller les sujets tabous. Avec un merveilleux et érudit tour
d'horizon de la vie et de la société, des bactéries
jusqu'à l'Internet, il prouve que la sélection de
groupe est réelle et que le cerveau global est là
depuis le début. L'ère dans laquelle nous pénétrons
maintenant est une des dernières phases de l'évolution
du cerveau global. A lire absolument.
Robin
Fox, Rutgers University.
Howard
Bloom a une vision fascinante des interpénétrations
de la vie et un style étonnant que j'ai trouvé
captivant.
Nils
Daulaire, Président de "Global Health Council".
Le
travail de Howard Bloom est tout simplement brillant et il n'existe
rien de comparable, quelles que soient les disciplines ou
confrères consultés. Le Principe de Lucifer 2
est puissant et provocant. En fait, il explose la cervelle....
Don
Edward Beck, Ph.D., auteur de Spiral Dynamics.
Le
Principe de Lucifer 2 est un tour de force
historique,
basé sur l'évolution et sur la complexité des
systèmes adaptatifs.
Dorion
Sagan, auteur de Biospheres et de Into the Cool: The New
Thermodynamics of Life
Fabuleux !
Howard Bloom a une fois de plus réussi.
Peter
Corning, President de « International Society For the
Systems Sciences ».
Howard
Bloom croit que le Léviathan, ou société en tant
qu'organisme, n'est pas une jolie métaphore mais un
produit contemporain de l'évolution. La bataille
darwinienne pour l'existence s'applique aussi bien aux sociétés,
qu'aux individus. Nous peinons en tant qu'individus, mais nous
faisons partie de quelque chose de bien plus grand que nous-mêmes,
avec une physiologie et une vie mentale complexe que nous portons
mais que nous ne comprenons que très peu. Avec cette vision
carrée de l'évolution et du comportement humain, Bloom
se trouve maintenant loin devant la timide horde des scientifiques.
David
Sloan Wilson, co-auteur de The Evolution and Psychology of
Unselfish Behavior
Bloom
dépeint (...) l'importance du partage d'informations et
des autres formes de coopération dans les organismes allant
des bactéries aux humains. (...) Le style de Bloom est habile,
plaisant et agréable.
Peter
J. Richerson, Department of Environmental Science and Policy, UC
Davis 
Process.
Vous
n'avez pas vécu tant que vous n'avez pas rencontré
Howard Bloom.
James Brody, Ph.D., Albert Einstein Medical College of Yeshiva
University.
Ma
tête est encore en train de tourner après avoir
découvert un tel contenu et une telle éloquence.
Howard Bloom décrit avec détails et clarté
ces choses qui agacent l'âme.
Valerius
Geist, President de « Wildlife Heritage ».
Ayant
passé 40 ans de ma vie dans la psychologie et m'étant
intéressé presque aussi longtemps à
l'évolution, je vais simplement assimiler l'accomplissement
de Howard Bloom.
David
Smillie, Professeur de zoologie, Duke University.
Mon
Dieu ! Ça, c'est VRAIMENT génial !
Richard
Brodie, inventeur et programmeur du traitement de texte Word
A
Pierre Jovanovic qui m'a donné
force,
courage, énergie et conviction.
PROLOGUE
La
Biologie, l'Évolution
et
le Cerveau Global
Depuis
les premiers pas de l'ordinateur personnel en 1983, écrivains
et scientifiques publient des livres consacrés à la
création d'un cerveau global futur, composé
d'ordinateurs reliés en réseau. Il est vrai, Internet
permet aujourd'hui à un médecin de Strasbourg
d'échanger instantanément ses idées avec un
philosophe sibérien et avec un spécialiste américain
des algorithmes.
Mais,
selon ces visionnaires qui annoncent une intelligence englobant le
monde entier, tout ceci n'est en réalité que le début.
Ils affirment par exemple que la transformation humaine a enfin
commencée 1
et qu'elle rassemblera « les milliards d'esprits de
l'humanité en un système unique (...) [ telle ]
Gaïa créant son propre système nerveux » 2 .
Bientôt nous nous réunirons, disent-ils, sur un réseau
informatique qui apprendra notre manière de penser et nous
donnera les informations dont nous avons besoin avant même
qu'on les désire consciemment 
fera de la race humaine un « être spirituel »
unique, une « conscience collective »
massive .
Le
résultat sera « l'un des plus grands bonds de
l'évolution de notre espèce » 3 .
Cependant,
mes vingt années de travaux interdisciplinaires révèlent
que derrière ces annonces futuristes se cache une surprise
étrange : oui, la connexion informatisée des
esprits peut apporter un changement considérable. Cette
intelligence mondiale n'est pas le résultat de la Silicon
Valley mais bien une des phases d'évolution de ce cerveau
global qui existe depuis plus de trois milliards d'années !
En effet, la Nature est bien plus douée en réseaux
informatiques que nous : ses mécanismes d'échanges
de données et de création collective sont encore plus
complexes et plus agiles que tout ce que les meilleurs théoriciens
informatiques ont imaginé jusqu'à présent.
Depuis
toujours, la socialité nous rassemble : il y a trois
milliards et demi d'années, les bactéries, nos premiers
ancêtres unicellulaires, évoluaient en colonies. Et
aucune bactérie ne pouvait vivre sans le contact réconfortant
de ses voisines. Séparée de ses compagnes, une bactérie
saine se divisait pour créer une société
constituée de nouveaux compatriotes 4 .
Unie au sein d'une gigantesque équipe, chaque colonie faisait
face à la guerre, au désastre et à la quête
de nourriture. Depuis toujours, nous, êtres humains, sommes ce
que la théorie évolutionniste actuelle refuse de voir,
une machine collective aussi rationnelle qu'inventive.
Ce
livre montrera que le simple fait d'être des bouts modestes
d'un réseau plus grand que nous a affecté non seulement
nos émotions, mais aussi nos perceptions et notre façon
de choisir nos amis ou de tyranniser nos ennemis. Que nous nous
battions avec des armes ou des idées, nous faisons tous partie
d'un esprit plus grand qui veut constamment essayer des possibilités
nouvelles : grâce aux guerres des Spartes et des
Athéniens, nous verrons que le QI humain a augmenté
( ou diminué ) en fonction de leurs luttes. Nous
lèverons le voile sur une bataille entre deux esprits
globaux, une guerre mondiale étrange qui pourrait ternir le
XXIe siècle, et qui pourrait se traduire par la
perte de trois milliards de vies humaines si nous n'apprenons pas à
mieux nous servir de nos libertés et de nos connexions.
Enfin,
nous proposerons dans ce Principe de Lucifer 2 une théorie
nouvelle qui explique les rouages internes de cette planète où
palpite un esprit gigantesque qui partage et diffuse l'information
( et que les scientifiques contemporains ne veulent pas voir ).
Si
la théorie de la « sélection individuelle »
a permis depuis son apparition en 1964 de comprendre bien des
comportements tels que l'amour, la haine ou la jalousie 5 ,
elle est
tombée en désuétude : les scientifiques
pensent maintenant que les humains, comme les animaux, sont en
réalité animés par leur besoin de répliquer
leurs gènes. Les scientifiques disent que tout comportement
est lié au strict intérêt personnel, ce qui n'est
pas une idée nouvelle : l'instinct de survie illustre le
concept de « la lutte ou la fuite » proposé
en 1908 par William McDougall 6
et popularisé en 1915 par Walter Cannon 7 .
Seul
problème : face à un danger mortel, certaines
créatures s'immobilisent, paralysées par l'angoisse, la
résignation ou la peur. En d'autres termes, au lieu de
« lutter ou de fuir » pour essayer de
s'échapper, elles demeurent immobiles devant les mâchoires
de la mort, se transformant d'elles-mêmes en proies faciles.
Même les humains n'échappent pas à ce
comportement : le célèbre David Livingstone, connu
pour la réplique « Dr Livingstone, je présume
», a lui aussi décrit ce phénomène :
J'ai
vu le lion se jeter sur moi (...) Il a bondi sur moi et attrapé
mon épaule 
terre. Rugissant horriblement près de mon oreille, il m'a
secoué comme un terrier le ferait avec un rat. Le choc a
produit une stupeur semblable à celle que semble ressentir une
souris la première fois que le chat la secoue. Cela a entraîné
une sorte de distraction dans laquelle n'existait aucune sensation de
douleur, aucun sentiment de terreur, bien que [ je
fus ] conscient de tout ce qui se passait. C'était
semblable à ce que décrivent les patients qui, sous
l'effet du chloroforme, voient l'opération se dérouler,
mais ne sentent pas la lame 8 .
David
Livingstone n'a pas ressenti le besoin de lever les poings ou de
s'enfuir en courant. Pourtant, aujourd'hui encore, l'hypothèse
de « la lutte ou de la fuite » est parole
d'Evangile. Heureusement, d'autres biologistes comme William Hamilton
eurent le courage de mettre en évidence le grain de sable dans
le mécanisme bien huilé de la survie : si la
survie individuelle est le but suprême de l'existence, comment
expliquer alors l'altruisme ?
William
Hamilton étudia le désintéressement avec lequel
les abeilles ouvrières femelles9
sacrifiaient leurs droits à la reproduction pour servir
chastement leur reine. Sa plus grande réussite fut de
mathématiquement démontrer que les ouvrières
portaient les mêmes gènes que leur reine. Ainsi,
lorsqu'une abeille consacrait sa vie à sa souveraine, elle
faisait semblant d'ignorer ses propres besoins. Mais en
choyant la reine pondeuse, chaque ouvrière prenait soin des
répliques de sa propre progéniture.
L'altruisme , affirma Hamilton
« n'était qu'un stratagème astucieux
visant à protéger ses propres gènes » 10 .
Ses idées,
et toutes celles qui en découlèrent11
ont considérablement augmenté notre connaissance des
mécanismes évolutionnistes dans des domaines aussi
variés que la médecine ou l'écologie. Mais,
vingt ans après sa révélation, un nouvel examen
des colonies d'abeilles a démontré que ses calculs ne
correspondaient pas à la réalité :
il y avait plus de variétés génétiques
dans les sociétés d'insectes altruistes que ne
l'autorisaient les équations d'Hamilton
Ensuite,
le suisse Hans Kummer publia en 1992 son livre In Quest of the
Sacred Baboon 13
dans
lequel il résumait ses vingt années de recherches sur
les babouins Hamadryas d'Ethiopie et d'Arabie Saoudite. Il prouvait
que tous les primates ne s'allient pas
systématiquement à ceux qui partagent les mêmes
gènes qu'eux. En fait, remarquait-il, lorsque les singes se
battent, ils se montrent souvent plus violents avec leurs parents
qu'avec des singes étrangers .
Donc, dans le cas des abeilles et des babouins, ils ne mettaient
pas de côté leurs intérêts uniquement
pour protéger des clones d'eux-mêmes et de leurs
chromosomes.
Apparemment,
un autre phénomène se produisait.
Cependant,
la théorie d'Hamilton sur « la sélection
individuelle » devint un véritable catéchisme !
Certains scientifiques tentés de s'en éloigner après
différentes observations méthodiques en furent
dissuadés. Dans les années 1990, ils risquèrent
le ridicule en défendant la validité simultanée
de « la sélection de groupe » et
de « la sélection individuelle »...
Pionnier de cette idée, le biologiste David Sloan Wilson, de
la State University of New York qui se basait sur plus de 400 études
mettant en avant « la sélection de groupe » 14 .
Sloan Wilson s'est concentré sur les hommes et a découvert
que ceux qui mettent en commun leur réflexions prenaient en
général de meilleures décisions que les cow-boys
solitaires qui gardaient leurs idées pour eux 15 .
Comme
nous l'avons vu, les défenseurs de « la sélection
individuelle » affirment qu'un créature ( homme,
femme ou animal ) sacrifiera son confort uniquement si le
bénéfice est plus important que son sacrifice 16 .
Mais une fois de plus, la réalité va contre cette idée.
Des chercheurs tels que René Spitz 17
découvrirent que chez l'être humain, l'instinct de
survie possédait un double, un double maléfique d'une
nature inattendue. Il s'agissait du dopplegänger*,
le désir de mort, mis en avant par Sigmund Freud. René
Spitz et d'autres scientifiques soulignèrent les différentes
manières dont l'isolement, la perte du contrôle et la
déchéance sociale provoquaient la dépression,
l'apathie, la dégradation de la santé, puis la mort.
Dans le tome 1 du Principe de Lucifer*,
je montre que chaque chercheur18
avait découvert un « mécanisme
d'autodestruction » précis, sorte de juge biologique
véhiculé par chacune de nos cellules, et qui peut nous
condamner avec une terrible sévérité.
René
Spitz a montré que presque 90% des bébés élevés
dans le confort en orphelinats19
mais privés d'amour et de câlins finissaient par mourir.
Harry Harlow a prouvé que les bébés singes
élevés sans mère ni camarades restaient dans
leur cage à gémir et s'arrachaient la peau jusqu'au
sang. Si on leur permettait de fréquenter les autres singes,
ces êtres affaiblis étaient affectivement trop effrayés,
trop stupides et trop perturbés pour nouer des contacts avec
les autres. Robert Sapolsky, lui, découvrit que le sang des
babouins sauvages incapables de monter dans la hiérarchie
sociale de leur tribu, était envahi de poisons hormonaux qui
tuaient leurs cellules cérébrales, faisaient tomber
leurs poils, supprimaient au passage leurs défenses
immunitaires et menaçaient même leur vie.
L'homme
et la femme sont apparemment semblables : d'autres études
ont également montré que les patients dépressifs
hospitalisés qui ont le plus besoin d'aide sont très
souvent privés de l'attention du personnel médical. Une
observation rigoureuse a révélé que les malades
déclenchaient involontairement leur propre rejet : les
patients déprimés gémissent, grognent ou
tournent la tête vers le mur 20 ,
s'aliénant ainsi leurs médecins et leurs infirmières.
Ils énervent le personnel soignant par tous les moyens
possibles, de l'expression de leur visage à l'intonation de la
voix, en passant par le langage corporel 21 .
Un
défenseur de « la sélection individuelle »
expliquerait que ce comportement destructeur doit être le
résultat d'une réponse adaptative masquant un avantage
caché : la mort du patient pourrait accélérer
le succès génétique de ses proches parents en
les soulageant d'un fardeau 
à l'assurance ou à l'héritage. Ou encore :
en se tuant de manière subtile, les patients pourraient
avantager des amis qui, un jour ou l'autre, renverraient l'ascenseur
à leur famille.
Mais
les études constatent exactement l'inve rse :
les patients ayant le plus grand nombre de parents et d'amis sont
ceux qui présentent le moins de risques d'être
dépressifs 
face à la mort ils restent charmants et attirent à leur
chevet une armée de médecins et d'infirmières
débordant de compassion. Pour les partisans de « la
sélection individuelle », ils sont les mieux placés
pour léguer leur dépouille à leurs enfants et
petits-enfants qui portent les répliques de leurs gènes.
Pourtant, ce sont eux qui risquent le moins de mourir et de faire
connaître prématurément leurs dernières
volontés.
Les
études sur les animaux et les humains démontrent que
les déprimés qui flirtent involontairement avec la mort
ne sont pas ceux attendus par les défenseurs de « la
sélection individuelle », mais bien ceux dont la
mort est peu susceptible de profiter aux parents, bien que
portant des gènes semblables aux leurs 22 .
Les liens familiaux de ces patients sont soit abîmés,
soit inexistants 23 .
Généralement, ils ne possèdent même pas
d'amis. En fait, ils ont souvent l'impression de jamais avoir trouvé
leur place dans ce monde 24 .
Ces malheureux sont apparemment envahis par ce qui peut s'apparenter
au mécanisme suicidaire appelé apoptose.
L'apoptose est une bombe à retardement composée
de tâches préprogrammées et qui se trouve dans
chaque cellule vivante. Quand la cellule reçoit des signaux
lui indiquant qu'elle n'est plus utile à la communauté,
la bombe se déclenche 25 .
Entre
des systèmes immunitaires suicidaires et un comportement
allant dans le sens contraire de leur survie, les individus isolés
accroissent largement leur risque de mourir 26 .
Le profit pour leurs compagnons de gènes sera nul ou presque.
Lorsqu'ils sont coincés par ce type de comportement, les
partisans de « la sélection individuelle »
affirment que nous observons là un instinct qui était
utile du temps où nous vivions dans des tribus de chasseurs 27 ,
instinct qui, lorsque nous errions dans la savane africaine,
augmentait réellement les chances de survie de nos
gènes. Ces apologistes déclarent souvent que la
civilisation moderne a perverti ce dont nous bénéficions
à l'époque de la première hache de pierre 28 .
Par exemple, des psychothérapeutes évolutionnistes ont
avancé l'hypothèse selon laquelle l'agitation
incontrôlable liée au trouble déficitaire de
l'attention tombait à pic dans les plaines africaines :
plus on bougeait dans ces régions, plus on avait de chance de
tomber sur des proies. En revanche, maintenant que l'on oblige nos
enfants à rester immobiles pour apprendre l'alphabet, on
condamne ce besoin de bouger.
Cet
argument est intrigant, mais il a peu de chance de tenir dans les cas
que nous évoquons. Lorsque l'on enlève des chimpanzés,
des chiens, des souris de laboratoire ou d'autres espèces
d'animaux au groupe qu'ils connaissent et qu'ils aiment29,
l'épuisement
les submerge, leur système immunitaire régresse et ils
finissent par dépérir 30 .
Tout comme nous, ces créatures ont plus de risques de mourir
lorsqu'on les prive de leurs liens sociaux que lorsque leur
disparition est susceptible de profiter à des porteurs de
gènes identiques. Pour ces animaux, le problème de
passer de trop longues journées dans des salles de classe
post-industrielles ne se pose pas ( surtout pour ceux dont la
dépression a été observée dans une savane
éthiopienne ) ...
C'est
là que le nouveau modèle évolutionniste présenté
dans le Principe de Lucifer Tome 1 arrive à
point : supposons un instant que les défenseurs de la
« sélection de
groupe » aient raison : un de ses partisans,
un naturaliste du nom de Charles Darwin, a affirmé en 1871 que
les groupes se battent et que face à de telles rivalités
« un peuple égoïste et querelleur ne sera
pas solidaire, et sans solidarité rien ne peut être
effectué. Une tribu riche des qualités citées
précédemment [ raisonnement (...) prévoyance
(...) habitude d'aider ses pairs (...) habitude de réaliser
des actions charitables (...) vertus sociales (...) et (...)
instincts sociaux ] s'agrandirait et serait victorieuse des
autres tribus. (...) Ainsi, les qualités sociales et morales
tendraient lentement à avancer et à se répandre
dans le monde entier » 31 .
En d'autres termes, les individus se sacrifieront pour
le bien d'un groupe. Lorsque les groupes se battent, celui qui a la
meilleure organisation, la meilleure stratégie et les
meilleures armes gagne. Les individus qui contribuent à la
virtuosité de leur groupe feront partie de l'équipe
survivante. En revanche, les individus trop préoccupés
par leur petite personne pour prêter main forte à leur
communauté, risquent de se faire couper bien plus que les
mains lorsque leurs habitations seront pillées par des
envahisseurs 32 .
Le
lien entre les défenseurs de « la sélection
de groupe » et les partisans de « la sélection
individuelle » est peut-être caché dans un
autre concept, celui du « système adaptatif
complexe ». Un « système adaptatif
complexe » est une machine à apprendre constituée
de modules semi-indépendants qui fonctionnent ensemble pour
résoudre un problème. Certains « systèmes
adaptatifs complexes » sont biologiques, comme par exemple
les forêts tropicales humides. D'autres, comme les économies
humaines, sont sociaux. Et ceux des informaticiens sont généralement
électroniques. Les réseaux de neurones et les systèmes
immunitaires en sont de très bons exemples : les deux
appliquent un algorithme une règle de
fonctionnement parfaitement exprimé par Jésus
de Nazareth : « Car on
donnera à celui qui a, et il sera dans l'abondance, mais à
celui qui n'a pas, on ôtera même ce qu'il a » .
Les
réseaux électroniques de
neurones sont des hordes de points de commutation reliés
en une toile complexe. Le réseau qui relie ces points possède
une propriété inhabituelle : il peut renforcer ou
désactiver le nombre de connexions et la quantité
d'énergie dirigés vers n'importe quel point de
commutation du réseau. Un système immunitaire est une
équipe d'agents, mais à une échelle bien plus
grande. Il contient entre 10 millions et 10 milliards de types
différents d'anti-corps. De plus, il possède une
quantité astronomique d'entités nommées
« lymphocytes T spécifiques au virus » .
Le système immunitaire, tout comme le réseau neuronal,
suit le précepte biblique : les agents qui contribuent à
la résolution d'un problème sont couverts de cadeaux
( des ressources ) et d'influence.
Mais
malheur à ceux qui ne peuvent pas aider le groupe...
Dans
le système immunitaire, les lymphocytes T en patrouille
détectent les signes moléculaires d'un envahisseur.
Chaque lymphocyte T est armé d'une structure différente
de récepteurs, sorte de grappins moléculaires.
Quelques-uns découvrent alors que leurs armes leur permettent
d'accrocher les attaquants et de les détruire. Ces champions
peuvent se reproduire à une vitesse hallucinante et reçoivent
la matière première dont ils ont besoin pour
massivement multiplier le nombre de leurs clones 33 |